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Bernard ASCAL / CHANSON DU GAI DESASTRE
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Ce CD est né de la complicité du chanteur Bernard Ascal* (aussi peintre et poète) et de sonfils, le musicien et compositeur Gaël Ascal. Deux univers singuliers qui se croisent le temps de 19 chansons pour créer cet objet décalé, sarcastique, alliant humour noir, gravité, interrogations sur les temps présents.
Accompagné par l’alliage incisif d’un quartet électrique — Fender Rhodes, guitare, basse, batterie — avec un quatuor de cordes acoustiques, ces chansons parlent de la solitude (Aquarium), des dangers du nucléaire (Le Ciel si bleu si calme), de la prolifération de l’espèce humaine (Frères Humains), de l’autocensure ordinaire (Képi), d’une forme imprévue de générosité (Service-Organes-Surveillance)…D’abord on rit jaune, puis on ne rit plus du tout lorsque les deux Ascal font grincer les mécanismes qui se referment sur nos libertés ou lorsqu’ils agitent les fantasmes de la haine de l’autre. Distillant le chaud et le froid, les Chansons du Gai Désastre sonnent comme un énergique appel à une plus grande lucidité.
01 Service-Organes-Surveillance 3’09
02 Couloir 3’25
03 La doudou la douleur 3’33
04 La serpillère 4’16
05 Etre une femme 1’22
06 Képi 3’04
07 Ballade du monométhane 2’55
08 Il m’arrive 0’28
09 Le ciel si bleu si calme 4’32
10 Buildings et tours de verre 2’23
11 Aquarium 2’50
12 Mécanisme 2’23
13 Au delà des mers 2’12
14 L’enclos 3’1
15 Doléances 1’00
16 Haro sur les limaces 4’17
17 Même quand on aime 1’43
18 Frères humains 3’23
19 Ça dépend 4’57
Bernard Ascal est un artiste en grand bouillonnement, en perpétuelle récidive. C’est un Géo Trouvetou dans presque tout ce qui relève de l’art, aussi enthousiasme qu’exubérant. Les amateurs de chanson n’avaient vraiment retenu de lui que son formidable travail de marieur de poésies et de musiques, unissant la crème de la poésie à ses notes, à son timbre, dentelé comme il se doit : Philippe Soupault, Abdellatif Laâbi. Aimé Césaire, Raymond Queneau, Guillaume Apollinaire, Joyce Mansour, Gérard de Nerval, Pierre Mac Orlan, Alain Mabanckou, François Villon, Léopold Sédar Senghor, Max Jacob... qui sais-je encore… Ascal fait chanter les rayonnages et affuble de mélodies les reliures de nos bibliothèques ! Avec parfois des surprises de taille tels ces textes de Le Corbusier devenus chansons, comme quoi le béton peut se dissoudre dans la fine architecture des mots et des sons. Ce qu’Ascal touche il le transforme. En une matière presque nouvelle. Ne le criez pas sur les toits : Ascal est alchimiste.
Très en vogue ces derniers temps, le « en même temps » s’applique depuis toujours chez lui : il est simultanément peintre, compositeur, musicien, interprète, directeur de collections Et aussi poète, parolier et nouvelliste.
Il y a quelques décennies, il se mit à écrire des nouvelles, alors publiées dans des brochures pas confidentielles mais presque. Qui, ironie du sort, furent ré-éditées en l’an 2020, après ce que l’Histoire tiendra pour la première vague de la Covid19, née, dit-on, des amours coupables d’un pangolin et d’une chauve-souris. C’est L’amateur de villes [et autres nouvelles grinçantes] (Rhubarbe éditions) : des histoires absurdes, absconses, un tantinet cruelles, effectivement grinçantes, qui aiment tant tronçonner les corps en huit que couper les tifs en quatre. Des textes d’anticipation, de fiction, de fission, de friction, qui n’auraient d’excuse qu’un total et angoissant confinement pour les écrire. Mais, dites, c’était quatre décennies plus tôt… Le poète a toujours raison : avec sa tignasse d’illuminé, où le sel a définitivement vaincu le poivre, Ascal, ce coquin, ce rascal, a tout d’un singulier et lumineux prophète.
Tant qu’il récidive avant qu’advienne le prochain confinement. Cette fois par des chansons à lui, des inédites d’un quart de siècle comme des nouvelles, les Chansons du Gai Désastre. Comme si un désastre pouvait l’être, gai ! Par lui, si ! Pas désopilant, mais.
Nouvelles et chansons se croisent et se toisent. C’est toujours le « je » qui prédomine, dans une étonnante proximité : Ascal est maître de son jeu, d’un monde le cul par dessus tête, d’une logique incertaine, schizophrène, d’un ordre médicamenté, militarisé.
Il y a du Kafka en Ascal, de l’Orwell (de 1984), du Franquin (des Idées noires) aussi. La posologie est quasi la même dans ses chansons, insolite cocktail d’anesthésiants et d’euphorisants, mots et maux qui, de concert, déambulent dans un monde blafard déchiré de cris d’écorchés vifs. Grinçant et jubilatoire, vous dis-je. Diabolique parfois, si je ne Mabuse.
Bernard Ascal explore là une dimension de la chanson qui n’existe pas, ne saurait exister. Qui certes emprunte pour partie à une chanson « engagée » (nous parler d’angoisse sécuritaire, ce n’est pas rien en ces temps tentés par une répression permanente), mais fait surtout son miel de l’absurde, de la cacophonie, du non sens, de l’irrespect du sens comme du son, par des textes et des musiques pareillement torturés, façon « expérimentation ». Par un orchestre à la tête duquel trône Gaël Ascal, à la direction musicale et aux arrangements : bonne hémoglobine ne saurait mentir.
Dans un monde de chansons bien fades, convenues, Ascal est comme un cheveu dans la soupe, surprise bienvenue, que d’aucuns diront jouissive. Il nous laisse à penser que la chanson peut encore cogiter, créer, transformer, être caillou dans la chaussure, poil à gratter, poil au nez. C’est une bonne nouvelle.
Michel Kemper, journaliste Chanson